LA PHILOSOPHIE A T – ELLE UNE QUELCONQUE UTILITÉ ?

INTRODUCTION

Éthymologiquement, la philosophie provient de deux termes dérivés du grec ancien : « philo » qui signifie « j’aime », et « sophia » qui veut dire « sagesse ». Autrement dit, la philosophie signifie littéralement l’amour de la sagesse. La philosophie est donc une discipline qui a une aura prestigieuse. Ainsi, en France, la matière dénommée philosophie n’est enseignée qu’au lycée, en classe de Terminale, car on considère que c’est une discipline qui vient couronner les savoirs déjà acquis dans les précédentes classes. On estime, par ailleurs, que pour parvenir à la philosophie, il faut de plus, une certaine mâturité, et voilà pourquoi cette matière n’est pas enseignée dans les niveaux scolaires antérieurs; car on pense que les élèves sont  alors trop jeunes pour une telle recherche intellectuelle. Cette place particulière de la philosophie dans l’enseignement français lui confère donc  un statut sublime et unique. Néanmoins la philosophie est une discipline qui est aussi très décriée, il est même arrivé qu’un ministre veuille la supprimer du cursus scolaire. On ne voit pas d’ailleurs une telle acrinomie, une telle hostilité et animosité en ce qui concerne les autres disciplines. Ainsi,  par exemple, quel est le ministre qui se permettrait de remettre en cause les mathématiques, et de vouloir les éliminer du parcours scolaire ?! On crierait tout de suite que ce ministre est un fou, et que c’est un scandale de tenir de tels propos. Mais qu’un ministre ait osé le faire en ce qui concerne la philosophie montre déjà que ce n’est pas un domaine comme les autres. Et pour beaucoup d’individus, faire de la philosophie n’a aucun intérêt réel et pratique, et l’écrivain Paul Valéry déclarait même : « Ce qu’on peut reprocher à la philosophie, c’est qu’elle ne sert à rien. » Mais ce propos de Paul Valéry n’est-il pas discutable ?! La philosophie est-elle inutile, n’est-ce qu’une somme de discours oiseux et stériles , du verbiage relevant de la masturbation mentale ?! Ou, au contraire, la philosophie n’est-elle pas non seulement utile, mais même vitale pour l’être humain ?!

PREMIÈRE PARTIE : LA PHILOSOPHIE, PAR CERTAINS ASPECTS, APPARAÎT COMME INUTILE.

Premier argument : La philosophie paraît être une discipline inutile car très souvent dans l’histoire de la philosophie, divers auteurs et penseurs ont professé des doctrines contraires les unes aux autres. Ce défaut de la philosophie lui est constitutionnel, inhérent, car déjà Platon dans le dialogue le Protagoras disait : « Sur toutes choses, on peut faire deux affirmations exactement contraires ». Ainsi pour ce même philosophe, « Philosopher, c’est apprendre à mourir ». Alors que pour un philosophe comme Spinoza, philosopher, c’est apprendre à vivre. Dans ce cas, le lecteur peut être désarçonné car il va avoir l’impression que la philosophie n’est pas une recherche de la vérité, mais une compilation d’opinions hétéroclites, et allant même jusqu’à la contradiction entre elles. Car l’exemple que nous venons de relever sur le thème de la mort, peut être appliqué à quasiment tous les domaines qu’aborde la philosophie. Ainsi, prenons la notion de passion. Nous avons un philosophe tel Hegel qui déclame « Rien de grand dans le monde ne s’est fait sans passion ». Mais des philosophes antiques comme les stoïciens ont eux, déclaré que les passions sont fondamentalement néfastes, et qu’il faut les vaincre pour parvenir à l’ataraxie (la paix totale de l’âme qui n’est plus troublée par aucun mouvement d’humeur). Ainsi parcourant l’histoire de la philosophie, nous risquons de tomber dans le relativisme des valeurs et de sombrer dans le scepticisme, faute de mieux. 

Toutes ces doctrines semblant se contredire les unes les autres peuvent étourdir l’esprit et lui donner comme une sorte de vertige intellectuel. Face à cet aspect désopilant de la philosophie, Willem Bilderdjik disait d’ailleurs : « La philosophie ne sert qu’à réfuter la philosophie ». Autrement dit, la philosophie n’est finalement rien de plus qu’un exercice de style pour habiller les diverses opinions pensables et possibles sur tel ou tel sujet. Cela peut nous donner une certaine aura dans la vie mondaine, mais cela ne peut réellement et concrétement nous aider à mieux vivre, peut-on alors penser.

Deuxième argument : Quand on voit tant d’opinions contradictoires se cotoyer dans l’histoire de la pensée ( 26 siècles depuis la naissance de la philosophie), on ne voit pas bien alors la différence entre la philosophie et la sophistique. On se dit que la philosophie est surtout une histoire d’habileté rhétorique, c’est juste un art oratoire qui s’abrite derrière de prestigieux paravents comme la Vérité, la Liberté, la Justice, le Bonheur… alors qu’en fait, il ne s’agit que d’un « trafic d’opinions« . Ainsi Lichtenberg écrit : « Il se livrait au trafic d’opinions, il était professeur de philosophie ». Ce qui renforce cet aspect des choses, c’est que la notation en philosophie dépend souvent des avis personnels du correcteur. Et d’ailleurs, il est notoirement connu et reconnu statistiquement dans l’Éducation Nationale en France que c’est en  philosophie qu’on retrouve le plus grand écart de notation pour une même copie corrigée au BAC par différents correcteurs. Ainsi nombre d’élèves ont l’impression que la réussite en philosophie est plus liée au facteur « chance » qu’à l’efficacité réelle de leur effort démonstratif pour soutenir telle ou telle thèse.

Troisième argument : Ce qui montre, de plus, une certaine inutilité de la philosophie, c’est qu’elle ne se développe en général que quand les besoins vitaux sont sustantés. la philosophie n’apparaît alors que comme une sorte de luxe qu’on peut se permettre quand on a du temps libre. C’est pourquoi Hobbes dans le Léviathan fait remarquer que « L’oisiveté est la mère de la philosophie ». mais quand on sait que l’oisiveté est aussi proverbialement la mère de tous les vices, on peut donc en conclure que la philosophie n’est qu’une activité réservée aux riches et aux nantis, aux gens débarrassés des soucis ordinaires de la vie (comme le boire, le manger et autres questions de survie).

Et si la philosophie est née en Grèce Antique à Athènes au Vème siècle avant  J-C, ce n’est pas un hasard, car ce sont les hommes libres qui ont élaboré cette discipline, tandis que les esclaves étaient asservis à la réalisation des tâches pénibles, mais pourtant (oh, combien indispensables !)

Quatrième argument : La philosophie apparaît par conséquent quelque peu impuissante face aux maux de cette existence. Elle nous permet peut-être quelque consolation, mais elle ne nous permet pas de changer la réalité en tant que telle. Par exemple, la philosophie nous enseigne que l’essentiel de l’existence n’est pas l’argent, mais elle ne nous permet pas, en général, concrétement de pallier au manque d’argent. Et quand la philosophie a essayé de changer le monde, comme on l’a vu avec Marx et Engels; le communisme (était un projet plein de bonnes intentions, soit), mais il s’est avéré dans son effort de concrétisation comme un échec patent et une catastrophe politique. Et le communisme, dans ses effets sociétaux s’est même révélé encore plus meurtrier que le nazisme. En constatant ceci, on peut se dire que des disciplines comme l’économie, ou la sociologie ont plus d’importance  et d’incidences directes sur la réalité, que la philosophie.

Cinquième argument: La philosophie ne semble donc pas avoir de prise tangible sur le réel la plupart du temps, et paraît même favoriser l’inaction par sa tendance à valoriser le doute. Les élèves entendent ainsi en cours de philosophie qu’ils doivent se départir des opinions convenues et advenues, qu’ils doivent apprendre à se méfier vis à vis de tout ce qu’on leur a enseigné jusque là. Ainsi à force de philosopher, ne se met-on pas à douter de tout ?! À pyrrhoniser ? Pyrrhon d’Élis (- 360 – 275 avant J-C) est justement le philosophe qui a mis à l’oeuvre un doute systématique durant son existence, à tel point qu’un jour où son ami Anaxarque était tombé dans une mare, Pyrrhon passa à côté de lui sans chercher à l’aider. Descartes, esprit rationnel et méthodique s’il en fût, utilisa aussi beaucoup le doute, il se mit même à douter de tout dans le but de savoir s’il existait une chose qui puisse résister au doute. Certes, Descartes n’en reste pas à ce doute inaugural dans sa démarche philosophique, mais il enseigne bien que la philosophie est une discipline où le doute est bien plus utilisé que dans n’importe quel autre domaine. Schopenhauer, quant à lui, définit la philosophie comme étant « une chasse aux préjugés ». Par cette définition, Schopenhauer nous montre bien encore une fois que le doute n’est pas accessoire en philosophie, mais qu’il est même fondamental quand on veut se questionner sur les grandes valeurs de l’existence. Le problème de ce doute, c’est qu’il a tendance à faire des esprits philosophes des indécis et des gens peu propres à l’action pratique. Les philosophes ne sont- ils pas ces gens qui se cantonnent à des jeux de langage ?  Avoir un bel esprit est toujours satisfaisant pour son ego, mais s’il n’est pas propre à l’action pratique, n’est-ce pas une vanité de plus ?!

Sixième argument : Enfin, la philosophie est une discipline qui semble par certains aspects se détacher du réel, puisqu’elle se préoccupe de métaphysique, au point que l’on peut dire qu’elle est inutile pour la vie concrète. Ainsi Descartes nous dit que la philosophie est comme un arbre dont les racines sont la métaphysique. Mais à vrai dire, des racines métaphysiques sont des liens bien peu terrestres ! Aristote, dans son ouvrage Métaphysique attribue aussi à la philosophie, cette « science de l’être en tant qu’être, et de l’être suprême ». Être suprême  qui est le « moteur immobile qui met en mouvement » tout le reste… La philosophie se préoccupe donc de l’existence de Dieu, mais aussi de l’immortalité de l’âme. Ainsi, Platon dans le dialogue le Phédon met en scène Socrate cherchant à démontrer l’immortalité de l’âme alors qu’il est condamné à boire la cigüe et qu’il s’entretient pour la dernière fois avec ses disciples. 

Mais cette préoccupation de la métaphysique en philosophie n’est pas qu’un avatar de la philosophie antique, puisque Descartes, dans les Méditations Métaphysiques cherche à nous prouver l’existence de Dieu, ou c’est encore Rousseau dans la Profession de Foi du Vicaire Savoyard qui tente d’extrapoler sa réflexion et ses pensées jusqu’à une vision déïste et ayant toujours le credo de l’immortalité de l’âme. Donc la philosophie moderne ne s’est pas départie de ce tourment métaphysique. On nous dira que des philosophes plus tardifs ont été par contre athées comme Sartre, ou Camus. Mais le mouvement existentialiste est passé de mode et si beaucoup de philosophes, de nos jours, se déclarent athées, certains philosophes comme Lévinas avec sa préoccupation de la sphère morale, et toute sa réflexion éthique sur le visage nous remet dans le champ de la métaphysique, et qui plus est à partir de la perception physique du visage d’autrui ! 

La métaphysique signifie éthymologiquement : ce qui est au-dessus (méta) de la physis (nature, physique). Autrement dit, métaphysique veut dire littéralement ce qui est au-delà de nos sens et de nos perceptions. Mais si justement la philosophie est tellement absorbée par cette sphère métaphysique , n’est-elle pas intrinséquement irréelle, et de fait inutile ?! Ainsi le philosophe paraît planer sur les hauteurs et semble scruter les Idées comme un ciel constellé brillant de milliers d’étoiles, mais n’est-ce pas le philosophe et savant Thalès qui tomba dans un puits, alors qu’il contemplait la voûte céleste ?! À force de regarder le ciel, il ne voyait même plus ce qu’il avait sous les pieds . N’en est-il pas de même pour tout philosophe et toute philosophie ?!

DEUXIÈME PARTIE :  SI ON APPROFONDIT LA RÉFLEXION,  ON CONSTATE QUE LA PHILOSOPHIE A  TOUT DE MÊME UNE CERTAINE UTILITÉ.

Réexaminons donc les arguments de cette première partie, et voyons s’ils ne sont pas objectables .

Objection au Premier argument : L’un des points faibles de la philosophie, nous dit-on, est que les philosophes ne sont pas capables de s’entendre entre eux sur les divers sujets qu’on leur expose. Mais il est normal et logique qu’en 26 siècles de l’histoire de la Pensée, les plus grands philosophes aient exploré à peu près tous les chemins qui s’offraient à leurs méditations, et qu’ils ne soient pas tous parvenus au même endroit ontologique ! Et l’on peut rétorquer que par ailleurs, sur certains sujets, on est arrivé à une sorte de consensus, à un certain accord des esprits.

Par exemple, les philosophes sont parvenus, en général, à faire primer la dignité de l’homme contre les divers asservissements qui le menacent. Ainsi, de nos jours, on ne trouverait pas un philosophe qui soutiendrait la légitimité de l’esclavage. Aristote, par exemple, à son époque ne s’est pas élevé contre l’esclavage, car il était lui-même trop « englué » dans son époque antique et les préjugés sociaux qui allaient avec. Mais sur la question de la liberté, par exemple, les philosophes sont tous d’accord maintenant pour soutenir qu’il en va de la dignité de l’homme « d’être libre » au sens politique du terme. Ainsi Rousseau, Condorcet, Kant et Hegel ont développé des philosophies différentes, et pourtant l’on peut dire quelque part que leur conception de la liberté humaine nous offrent un point de rencontre dans leur chemins philosophiques, dans la mesure où, pour eux tous, la liberté est un droit inaliénable de l’homme.

 Enfin si nous reprenons un des exemples cités en première partie, on peut voir que dans les positions philosophiques apparemment contraires, il y a quand même des points de jonction. Ainsi Platon, dans le Phédon, nous dit, que « Philosopher, c’est apprendre à mourir », et Spinoza dit lui apparemment l’inverse en déclarant  : « Un homme libre ne pense à aucune chose moins qu’à la mort, et sa sagesse est méditation non de la mort, mais de la vie ». Mais si nous nous penchons plus avant sur le sens de ces phrases, l’on peut voir qu’elles ne sont pas si contradictoires, car quand Platon nous dit que philosopher, c’est « apprendre à mourir », cela signifie qu’il faut mener une bonne vie avant de décéder pour accéder à une certaine paix de l’âme. Platon ne fait pas une incitation au suicide par cette phrase provocatrice, il veut susciter en nous le « réveil de l’être ». De même, Spinoza en disant « Un homme libre ne pense à aucune chose moins qu’à la mort » veut déclencher également en nous le « réveil de l’être ». Car Platon et Spinoza, en tant que philosophes, veulent tous deux inciter leurs lecteurs à plus de réflexion, à exister plus intensément, ne pas seulement être en figuration, mais être une présence, une incarnation réelle (Heidegger parlerait « d’être là », de « vrai étant »).

Aussi au lieu de ne voir dans les diverses philosophies que des séparations, nous voyons aussi des carrefours et des routes qui s’entrecroisent.

Objection  1 au deuxième argument : La philosophie, disent certains de ses détracteurs n’est pas une recherche de la Vérité, mais s’apparente à la sophistique. Mais dès le départ, la philosophie s’est distinguée de la sophistique et de la simple rhétorique. Dès le départ, Socrate s’est caractérisé par une recherche du vrai, un souci de justesse dans la parole qu’on ne trouve nulle part dans la sophistique. Les sophistes cherchent l’efficacité payante dans leurs discours, il n’y a pas un idéal de vérité qui sous-tend leurs paroles.

Déjà ce qui distingue le philosophe du sophiste, c’est que le philosophe cherche à définir ce dont il parle. Par exemple,dans le Ménon, Socrate cherche à définir la vertu, et dans le Lachès, Socrate essaye de définir le courage.Évidemment parfois le sophiste et le philosophe se ressemblent nous dit Platon dans le Sophiste, par l’art de la réfutation. Mais Platon précise : « Ils se ressemblent comme le loup au chien, la bête la plus sauvage à la bête la plus apprivoisée ». Et Platon rajoute par la bouche de l’Étranger d’Élée : « L’homme avisé doit toujours être en garde contre les ressemblances, car celles-ci sont un genre très glissant ». Car ce qu’a mis en relief Platon en mettant en scène Socrate, c’est que les principales erreurs proviennent du fait que l’on croit savoir ce qu’on ne sait pas. Par exemple, Lachès, le général croit savoir ce qu’est le courage alors que quand on l’interroge précisément il n’est pas capable de donner une définition globale du courage, il ne saisit le courage que dans sa dimension militaire, sur un champ de bataille. Or, la question du courage ne se réduit pas au terrain militaire. Mais malheureusement, quand on croit savoir ce qu’on ne sait pas, c’est là le type  d’ignorance qui est à l’origine de tout ce qui se fait de mal.

Par ailleurs, Socrate a montré (d’après les écrits de Platon) que la vie du rhéteur est soumise à la volonté eu aux désirs de ceux qu’il enseigne. Ainsi le sophiste a recours à la flatterie, car il est dépendant de l’argent vis à vis de ceux qui lui en donnent. Alors que la vie du philosophe est une vie indépendante consacrée au bien de l’âme, celle du sophiste est obligée de frayer avec la bassesse et l’ art de flatter. Le sophiste a la morale d’un courtisan, alors que le philosophe veut clarifier le discours et éclairer les esprits. 

Ainsi dans le dialogue Euthydème de Platon, un sophiste (Dionysodore) monopolise la parole pour tromper en disant que Socrate veut qu’un jeune homme dénommé Clinias devienne savant. Or, insiste le sophiste, « vous désirez que Clinias devienne sage ? ». « Certainement » répondent Socrate et ses amis. Alors Dionysodore poursuit habilement en disant : « Vous désirez donc qu’il ne soit plus ce qu’il est à présent, c’est à dire qu’il meure ». Socrate et ses amis s’offusquent d’un tel usage tronqué du langage. La philosophie s’attache justement à ne pas abuser du langage, à ne pas prendre un mot pour un autre. Socrate a fondé ainsi la Maïeutique, c’est à dire l’art d’accoucher les esprits par l’intermédiaire du dialogue. La mère de socrate, en effet, était sage-femme et Socrate ajoutait en quuelque sorte : « Comme ma mère faisait accoucher les corps, moi, je fais accoucher les âmes ». Mais cet accouchement des âmes n’est pas sans douleur et sans difficultés et sans désillusions. La philosophie est là pour nous faire penser au-delà des lieux communs et des phrases toutes faites. La philosophie est à l’opposé de la paresse intellectuelle, c’est pourquoi Socrate (dans Apologie de Socrate de Platon) se compare à un taon : « je suis le taon qui , de tout le jour, ne cesse jamais de vous réveiller, de vous conseiller, de morigéner chacun de vous ». La philosophie interpelle les consciences qui menacent de s’endormir.

Mais la philosophie est aussi la science des sciences, le savoir des autres savoirs, car elle est la discipline qui réfléchit sur tous les autres domaines de l’activité humaine. il y a en ce sens un aspect sublime de la philosophie. Mais à ce moment là, ne peut-on pas faire une deuxième objection à la philosophie en tant que recherche de la Vérité ?

Objection 2 au deuxième argument : La philosophie est une recherche de la vérité, s’exclament ses opposants, mais alors quelle prétention ?! Quel orgueil démesuré ?! Et voyez d’ailleurs comme ces philosophes sont si personnels, comment peuvent-ils alors s’enorgueillir et se targuer d’approcher la Vérité ?! La Vérité, est une vue objective de la réalité, ajoutent-ils, mais un esprit humain, par essence, n’est-il pas limité dans le temps et dans l’espace, si bien que tout esprit si intelligent soit-il ne nous offre qu’une vue subjective de la réalité ?! Que répondre à cette accusation ?

C’est vrai que tout philosophe, dans son oeuvre, finit immanquablement par être un peu personnel. Ainsi Nietzsche dans Par-delà le Bien et le Mal fait la remarque suivante : »Jusqu’à présent toute grande philosophie fut la confession de son auteur, une sorte de mémoire involontaire ». Forcément la philosophie se nourrit et se bâtit dans l’expérience de son auteur; Nietzsche disait d’ailleurs de lui-même « j’ai écrit ma philosophie avec mon sang » pour souligner à quel point la recherche du sens de la vie se fait toujours à partir de sa propre vie. Ainsi Pascal parle de sa conversion à la philosophie après son accident de carosse, et Montaigne est singulièrement biographe dans ses Essais. Mais cela est logique car avec la philosophie toute vie devient une aventure dans la mesure où elle est une quête du sens, elle accroît le degrè d’intensité de notre existence. Non seulement je vis, mais je pense à ce que je vis. Se mettre à philosopher donne à l’existence un « supplément d’âme », c’est une prise de conscience qui bouleverse notre perception du monde et de la vie. La perception du monde n’est plus seulement intuitive avec la philosophie, notre perception du monde devient réfléchissante. D’un point de vue métaphorique, on peut dire qu’entrer en philosophie, c’est comme voir une lumière qui percerait un brouillard et qui se mettrait à tout désépaissir progressivement autour d’elle.

Mais certes, la philosophie nous éclaire disent ses détracteurs, mais elle n’éclaircit qu’à partir d’un point de vue particulier. Et ils continuent en ajoutant,  : « Ce n’est pas de la Vérité dont il s’agit, mais de sa vérité « (sous-entendu, celle de l’auteur dont il est question). Et, en effet, comment une vie, en quelque sorte une vérité, peut-elle prétendre à accéder au rang de philosophie, c’est à dire de mériter le titre d’expérience universalisante ?! Pourquoi la vie « du commun des mortels » ne serait-elle pas aussi éclairante que celle du philosophe ? Tout simplement, parce que le commun des mortels n’allume pas sa  propre « lanterne », sa propre conscience au soleil des Idéaux qui sont (on le sait depuis Platon !) les Idées de Beauté, de Vérité et de Bonté. En ayant en vue ces idéaux, la philosophie a un point de vue plus éclairant que la moyenne des individus. Tous les individus ont une conscience, mais tous n’ont pas le même degré de conscience. Tous n’ont pas justement vraiment conscience de cette conscience; ils ne sont que des connaissances intuitives et pas encore des consciences réfléchissantes. C’est pourquoi, oui, nous pouvons affirmer que le point de vue du philosophe est plus éclairant que celui de la plupart des individus; oui, le point de vue du philosophe a une certaine objectivité même s’il ne peut pas se départir d’une certaine subjectivité. Ce qu’il est important de voir, c’est de voir à quel point la Vérité est tout de même perçue à travers le prisme des Idéaux, des plus hautes Idées. 

Mais objecteront encore certains, certains philosophes ne se sont-ils pas justement méfiés de ces Idéeaux de Beauté, de Vérité, de Bonté ?! Nietzsche, par exemple, n’a t-il pas été le fossoyeur de ces idéeaux, lui qui de plus, a proclamé la mort de Dieu ?! Nous répondrons à ces gens, que certes Nietzsche a voulu prendre ses distances vis à vis de ces Idéaux, mais Nietzsche est en quelque sorte l’exception qui confirme la règle. Nietzsche est un idéaliste qui s’ignore car il ne cesse de dénoncer le nihilisme de ses contemporains. Et le fait que Nietzsche soit devenu fou après avoir embrassé un cheval maltraité ne montre t-il pas d’ailleurs que finalement il a reconnu « dans sa chair et dans son sang », la primauté de l’Idée de Bonté ?! Car Nietzsche n’est pas devenu fou sur un simple coup de tête, dans la survenue de sa folie, il y a une reconnaissance existentielle de l’Absolu de la part de ce philosophe car il se prosterne finalement devant l’Idée de Bonté puisqu’il est pris, saisi de compassion pour une pauvre bête martyrisée par son maître !  Donc , l’exemple de Nietzsche ne contredit pas ce que nous venons de dire précédemment, mais bien au contraire, vient encore confirmer notre propos. On n’en finira jamais donc de philosopher, car chaque homme, s’il le veut, « s’il rentre en philosophie » peut voir sa vie transformer par l’aventure intérieure de son propre esprit.

Objection au troisième argument : Mais disent encore les ennemis de la philosophie, la philosophie est une sorte de luxe pour les nantis, ou pour l’élite spirituelle d’une génération donnée mais, la philosophie ne saurait être nécessaire à tous… Nous répondrons à ces gens bien intentionnés que le sens de la vie est une urgence pour nous tous et pas seulement pour quelques uns d’entre nous. L’utilitarisme pratique dont se targuent les pourfendeurs de la philosophie ne semble pas surchargé d’Idéalisme démocratique ! La philosophie est plus qu’utile, elle est vitale, car elle rend la vie intéressante. Ainsi Jankélévitch dans De la Philosophie remarquait : « On peut vivre, après tout, vivre sans le « je ne sais quoi » comme on peut vivre sans philosophie, sans musique, sans joie et sans amour. Mais pas si bien ». La philosophie n’est pas une option que pour les gens qui veulent prendre le temps de réfléchir, car ce qui fait la noblesse de l’être humain, n’est ce pas plutôt l’esprit que le corps ?! L’activité de penser certes est encore invisible à l’oeil nu, mais elle existe pourtant, et c’est ce qui fait la profondeur du regard d’un individu. Par ailleurs, l’activité de penser est de plus en plus visible avec le progrès des neuro-sciences et des scanners du cerveau. Cependant l’intimité d’une conscience en exercice ne pourra jamais se traduire par une équation algébrique ; et voilà pourquoi les ouvrages de philosophie nous seront toujours « utiles » au sens spirituel du terme.

Objection au quatrième argument : Certains disent aussi que la philosophie ne sert à rien, car elle n’a pas de prise concrète sur le monde. Mais dans toute l’histoire de la philosophie, il y a quand même eu des philosophes qui se sont donnés pour tâche de changer notre rapport au monde. Ainsi dans la onzième de ses thèse sur Feuerbach, Marx écrit : « Les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde, ce qui importe, c’est de le transformer ». Historiquement le communisme est bien une tentative concrète pour instaurer un autre type de société. Mais les détracteurs de la philosophie ne manqueront pas de souligner que cet essai de changement de société s’est soldé par un échec. Mais cela ne veut pas dire qu’à l’avenir, d’autres théories philosophiques de projets de société ne permettront pas de réaliser des progrès considérables dans l’amélioration des conditions de vie du genre humain. Et les philosophes n’ont pas attendu Marx pour tenter de changer la société. Ainsi Platon alla à Syracuse pour persuader le tyran Denys II de mettre ses projets de réforme en pratique. La philosophie a donc déjà permis des tentatives, meême infructueuses, elles peuvent nous instruire sur certaines erreurs déjà commises et à ne pas refaire.

De toute façon, on ne saurait nier l’influence de la philosophie du XVIIIème siècle (dite « philosophie des Lumières ») dans l’apparition des Droits de l’Homme. Bien sur le christianisme, comme toile de fond à notre société occidentale a sans doute eu aussi une influence; mais ce sont les philosophes du XVIIIème siècle qui ont vraiment saisi leur rôle en tant qu’instance inspiratrice pour l’amélioration de la société. La philosophie a donc déjà essayé de changer le monde, elle a en partie réussi grâce à l’avénement des Droits de l’Homme, et elle le fera encore demain. cela est inéluctable et heureusement !!

Objection au Cinquième argument : Les ennemis de la philosophie l’accusent aussi de répandre le doute ; mais justement ce doute instillé par la philosophie au commun des mortels est profondément bénéfique. Ce doute est salvateur, car il permet d’éviter le fanatisme et l’intolérance, et sans doute que l’Islam est encore aussi meurtrier parce qu’il n’ a pas eu comme le christianisme son siècle des Lumières. Car il y a quelques siècles, nous nous écharpions bien au nom de notre religion chrétienne (notamment on peut citer toutes les guerres de religion entre protestants et catholiques), et ce n’est pas si lointain que ça !

Donc le doute philosophique n’est pas si négatif que ça, et il est logique que les religieux aient toujours vu les philosophes avec méfiance, car ils se sont toujours dits qu’ils étaient un risque pour leur pouvoir. Mais c’est cet esprit critique qui fait de nous des hommes libres, aussi Diderot disait : « Le premier pas vers la philosophie, c’est l’incrédulité ». Fréquenter les philosophes et la compagnie de leurs livres, cela développe indéniablement une capacité critique à notre esprit. Mais cela est civilisateur, car plus les gens ont d’esprit critique, moins ils sont manipulables. Aussi Voltaire, dans son Traité sur la Tolérance remarque avec justesse : « La philosophie, soeur de la religion, a désarmé des mains que la superstition avait si longtemps ensanglanté ». Car les progrès des mentalités dus à la philosophie se sont affirmés à partir du moment où l’imprimerie a été inventée, car les écrits des philosophes ont pu alors largement se diffuser à partir de la multiplication de l’apparition des livres.

Cet esprit critique développé par la philosophie est absolument nécessaire à une société dite démocratique aussi Gusdorf a écrit : « La philosophie, dans son ensemble, refuse de valider le droit du plus fort; elle pourrait se définir comme le passage de la violence à la raison ». On peut même dire que la philosophie est vitale pour une société donnée, dans la mesure où elle permet de contrôler les excès de toute religion quelqu’elle soit.

Objection au Sixième argument : La philosophie ne sert pas la vie concrète, ni à un niveau collectif (ce que nous venons de contrecarrer), ni à un niveau individuel, ajoutent les détracteurs de la philosophie. Quelle est l’utilité concrète de la philosophie à un niveau individuel ? demandent-ils. Nous répondrons à ces gens que la philosophie a une utilité spiriituelle. Et si ces gens ricanent en disant qu’une utilité ne peut être que pratique, nous leur ferons remarquer que l’homme ne se nourrit pas que de pain et d’eau, que l’homme ne peut être réduit à sa sphère physique, à son aspect simplement corporel. La philosophie sert la vie concrète à un niveau individuel car elle nous aide à développer notre vie intérieure, elle nous incite à réfléchir et donc permet à la personnalité de s’épanouir.

La philosophie, c’est un dialogue ininterrompu avec soi-même, et cela peut aider à faire les bons choix dans la vie, à prendre les bonnes décisions au lieu de se laisser phagocyter la cervelle par des dogmes religieux pris « stricto sensu » sans recul psychologique.

Et si parfois la philosophe ne nous empêche pas de faire des erreurs, elle nous apportera du moins quelques consolations ainsi , c’est Schopenhauer dans ses Aphorismes sur la Sagesse dans la Vie qui remarquait : « Ma philosophie ne m’a rien apporté, mais elle m’a beaucoup épargné ». Quant à nous-même qui avons dévoré cet ouvrage de Schopenhauer avec reconnaissance, (tant il est intéressant et formateur), nous pouvons dire que la philosophie nous a sans doute permis d’être plus sûr de nous-même. En voyageant dans la République des Esprits (c’est ainsi que Schopenhauer dénomme la communauté des philosophes à travers le temps et l’espace), nous avons vu des pensées que nous avions nous-même ressenti, et cela nous a soulagé de voir que nous n’étions pas les premiers à être en butte à la méchanceté et à la bêtise humaines. Notre esprit s’est exercé à la méditation en lisant des penseurs sagaces, et nous avons gagné considérablement en profondeur, nous sommes parvenus à une indépendance d’esprit, mais aussi à avoir un esprit plus rationnel, moins enclin à croire n’importe quoi et n’importe qui. La fréquentation des philosophes a nourri notre soif de savoir bien plus que des dogmes religieux plus propres à régenter des époques antérieures où la science n’était pas aussi développée. La philosophie ne nous a d’ailleurs même pas dégouté de Dieu, mais bien au contraire, l’exercice constant de notre esprit nous a appris  à le redécouvrir d’une manière plus intelligente et moins servile. La philosophie nous a fait découvrir le champ conscient de notre esprit, mais aussi son aspect inconscient, la philosophie nous a permis une amamnèse maginifique sur nous-même, à nous accepter avec notre histoire, et à nous aimer pour être un être humain fréquentable pour les autres.

TROISIÈME PARTIE : LA PHILOSOPHIE, DU FAIT DE SON INTÉRÊT EST DONC UNE DISCIPLINE ÉTERNELLE.

Premier argument : La philosophie est absolument nécessaire, car toutes les questions ne relèvent pas que de la science ou la technique. Ainsi, au niveau des sciences et des techniques, les questions sont circinscrites au niveau du comment, tandis qu’au niveau philosophique, les questions sont infinies, car elles relèvent du pourquoi. Cette distinction relative aux délimitations propres aux sciences et à la philosophie a été mise en relief d’ailleurs par Auguste Comte dans son Discours sur l’Esprit Positif. Ainsi , en sciences, par exemple, on se demandera comment s’effectue concrétement la loi de la chute des corps, et on calculera la vitesse d’un objet qui chute à tel ou tel instant de son parcours. Galilée, puis Newton ont perfectionné ce type d’études qui finalement se réduisent à des lois algébriques et arithmétiques. Mais un philosophe, par contre, se demandera puorquoi y a t-il une telle attraction entre toutes les choses, et il en cherchera le fondement métaphysique; tel Schopenhauer, dans le Monde comme Volonté et comme Représentation, qui voit dans cette fameuse loi de l’attraction universelle  des corps une expression déjà du « vouloir-vivre ».

La science répond à des questions circonscrites : Comment faire pour produire par exemple, la fission de l’atome (qui est à l’origine de la production de l’énergie nucléaire). Alors qu’un philosophe se demandera pourquoi produire une telle énergie ? Y a t-il plus d’avantages que d’inconvénients à cette pratique qui peut aboutir aussi bien à la production de centrales nucléaires qu’à la production de bombes atomiques ?

La philosophie est éternelle, et n’est donc pas destinée à périr avec le développement des sciences (comme l’a pensé au XIXème siècle, Comte); car la science elle-même, renouvelle notre rapport au monde et à la matière et donc pose de nouveaux problèmes philosophiques.

Deuxième argument : Ainsi la science pose de nouveaux problèmes éthiques   ( nucléaire, GPA), mais la philosophie est éternelle aussi car l’accroissement du savoir en science renouvelle notre rapport à la question de Dieu, de l’origine de l’univers, et de sa finalité.

D’ailleurs, avec le développement de la science, on ne peut plus uniquement  croire en Dieu en ayant pour credo de croire « à la lettre » tout ce qui est raconté dans la Bible. La Bible n’est pas à mettre de côté, mais elle doit aussi être perçue dans son aspect fondateur et de fait mythologique. Ce sont des récits très anciens et très intéressants et moralement formateurs; mais ils ne peuvent suffire aujourd’hui à contenter toute la soif de savoir qui est en l’homme. 

Par exemple, quand on nous dit que le Peuple Hébreu fuyant Pharaon et son armée a  trouvé la Mer Rouge fendue en deux pour pouvoir la traverser sans encombres; des scientifiques d’aujourd’hui pensent qu’il s’est plutôt passé un phénomène de marée basse, mais pas comme cela nous est raconté dans la Bible et les films Hollywoodiens (qui nous montrent spectaculairement la mer coupée en deux et faisant comme des murs d’eaux !) Le miracle, par contre, est qu’il y ait eu ce phénomène de marée basse au moment où le Peuple hébreu fuyait (ce que Jung appelait la « synchronicité » des événements).

Avec le développement de la science, nous ne pouvons plus croire en Dieu comme de naïfs petits enfants qui croient en la véracité des contes de fée. Ainsi l’univers ne s’est pas créé en 6 jours, mais en 13 milliards 700 millions d’années. Et quand on nous dit dans la Bible que Dieu a tout créé en six jours, il faut voir dans le mot « jour » une sorte de métaphore poétique : un jour correspondant non à 24 heures, mais à une durée beaucoup plus longue. Ainsi les récits de la Genèse ne sont pas faux « stricto sensu », ils sont profondément vrais à un niveau symbolique et métaphorique, mais ils ne sont pas vrais scientifiquement parlant ( car un jour correspondant dans ce cas là à environ un milliard d’années, ou du moins à plusieurs millions d’années à chaque fois).

Avec le développement de la science, la philosophie devient donc encore plus nécessaire car l’Humanité est arrivée à un certain degrè de développement et de mâturité telle qu’elle n’est plus « dans son enfance » à se contenter d’explications mythiques. C’est pourquoi B.Vergely n’a pas tort dans son ouvrage intitulé De l’Utilité de la Philosophie, quand il dit que « la philosophie est le devenir de la religion ». La philosophie, notamment permet de décoder la portée symbolique de beaucoup de textes religieux. B.Vergely écrit ainsi : « Ce n’est pas Dieu qui est génant en philosophie. Près de trois mille ans de pensée inspirée par Dieu le prouvent. C’est un Dieu qui n’ouvre pas la pensée qui est génant, un Dieu bête » (aussi bête que la pensée d’un intégriste notamment).

Donc penser que tout philosophe à notre époque est athée est une vue simpliste, ainsi Hugo dans Post-Scriptum de ma Vie : disait déjà : « La vraie philosophie détourne des religions et pousse à la religion ». Au-delà des particularismes culturels, les philosophes auront tendance à voir ce qu’il y a d’universel dans les diverses formes de croyances en Dieu, apportant ainsi à l’humanité une salutaire tolérance.

Troisième argument : Enfin, la philosophie n’est pas seulement utile à un certain âge de la vie, mais à tous les âges de la vie. Aussi Épicure dans sa Lettre à Ménécée insiste sur cet aspect : « Il faut que le jeune homme aussi bien que le vieillard cultivent la philosophie ». La philosophie est cette quête du sens de nos vies, nous ne sommes pas que des êtres constitués de matière, mais aussi d’esprit. Et cet univers dans lequel nous atterrissons à la naissance est tellement infini et magnifique, que même avec le développement de la science, la question de l’Absolu continue de nous tarauder. Nous voyons ce monde merveilleux, ce chef d’oeuvre de l’évolution qu’est l’être humain, et nous sommes bien obligés de nous avouer qu’il y a quelque chose qui nous dépasse… Aussi la philosophie n’est pas faite que pour les jeunes qui passent le BAC, ou pour les vieillards qui recherchent le sens de ce qu’ils ont vécu et devant apprivoiser la pensée de la mort. La philosophie, est utile, spirituellement parlant à tous les âges de la vie. Et Épicure disait aussi, en ce sens : « Celui qui prétend qu’il n’est pas encore prêt pour la philosophie ou qu’au contraire, il est trop tard pour lui, est comme celui qui dit qu’il est trop jeune ou trop vieux pour le bonheur ». La philosophie permet d’avoir des échanges plus intéressants avec les autres, elle nous fait également découvrir le vrai sens de l’amitié en nous incitant à des conversations qui reviennent à l’essentiel, et plus seulement englués dans le banal et le quotidien. La philosophie est cette discipline qui nous permet de prendre du recul par rapport à nos préoccupations simplement matérielles.

CONCLUSION

La philosophie n’est donc pas inutile, elle est même nécessaire, et elle n’est pas destinée à périr dans les siècles à venir. Si nous avons un esprit, c’est pour nous en servir. Ne pas philosopher, ce serait en être réduits à ne jamais se poser la question du sens de ses actes. Ainsi Descartes, dans les Principes de la Philosophie s’exclame : »c’est proprement avoir les yeux fermés, sans tâcher jamais de les ouvrir, que de vivre sans philosopher« . Nous serions comme des aveugles spirituellement parlant, si nous ne philosophions pas. ne cherchant pas de chemin, étant désorientés, et menant notre vie au hasard des rencontres et des faits. La philosophie, pour quoi faire donc ?!  Pours se faire, tout simplement.

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